Pirogue Tu Marama : un ouvrage à 46 millions qui tombe en ruine

Publié le

Ce qui devait être un symbole culturel tourne au fiasco. Inaugurée il y a deux ans, la pirogue Tu Marama tombe aujourd’hui en ruine. Écartée de l’espace public et stockée sous un chapiteau, elle a relancé un débat politique à l’Assemblée. Le Tapura parle d’abandon, le gouvernement dénonce un projet mal étudié dès le départ par précédent exécutif et refuse d’engager davantage de fonds publics.

Son inauguration place Tu Marama avait été célébrée en grande pompe le 29 juin 2022. Deux ans plus tard, la pirogue a triste allure. Exposée au soleil et à la pluie, elle présente des fissures et des infiltrations qui nécessitent son retrait.

Et s’il avait d’abord été question de la rénover, cette maquette de 18 mètres de long dort aujourd’hui sous un chapiteau, à Motu Uta. Un symbole culturel « à l’abandon » a déploré Edouard Fritch lors d’une question orale, à l’Assemblée, au ministre des Grands Travaux.

 

– PUBLICITE –

« Qu’avez-vous décidé de mettre en œuvre pour restaurer cette pirogue ? Avez-vous envisagé la construction d’un abri pour la préserver ? Il s’agit d’une pirogue que nous avons conçue en hommage à nos ancêtres », a lancé l’ancien président du Pays.

Mais pour le ministre Jordy Chan, pas question de dépenser un franc de plus sur ce projet qui a déjà coûté 46 millions.  « La dernière expertise réalisée chiffre les réparations à près de 25 millions de francs, ce qui équivaut tout simplement au coût de fabrication d’une nouvelle pirogue. À cela, il faut ajouter le coût de construction du fare va’a, que vous n’avez pas pris la peine de réaliser, et qui est estimé aux alentours de 25 millions, soit un coût total de 50 millions de francs », a-t-il répondu.

Et le ministre d’ajouter : « monsieur le président Fritsch, nous paraît-il opportun de dépenser 50 millions de francs pour reconstruire une pirogue qui ne navigue pas ? La réponse est non. Nous ne souhaitons pas poursuivre le gaspillage des deniers publics polynésiens ».

La pirogue est aujourd’hui stockée sous ce chapiteau à Motu Uta. (Crédit: TNTV)

Et sur la question de l’abri, Jordy Chan n’hésite pas à renvoyer la balle dans le camp de son interlocuteur : « Peut-être par mépris, ou par méconnaissance des traditions, vous n’avez pas pris soin de construire un fare va’a pour abriter la pirogue, et ce malgré les préconisations de son constructeur ».

C’est dans un atelier à Taputapuatea, sur l’île de Raiatea, que la pirogue a vu le jour après 14 mois de chantier. Son constructeur, John Rere explique qu’un projet d’abri était bien prévu à l’époque.

« On devait la mettre sous un fare va’a et on s’est aperçu qu’il fallait presque fermer la moitié du parking pour mettre des poteaux de soutènement suffisamment solides pour pouvoir supporter le fare. Un architecte a dessiné les plans. Et il y a eu le Taui. C’est comme ça que le projet est tombé à l’eau. Mais la pirogue était encore bien à ce moment », indique le maître d’œuvre.

Reste à savoir ce qu’il adviendra de cet ouvrage et s’il sera un jour remplacé par un autre projet culturel.

Dernières news

A lire aussi

Activer le son Couper le son