Tahiti Nui Télévision : Pour cette Pride Parade, une trentaine de personnes se sont rassemblées. On imagine qu’il y a pourtant beaucoup plus de personnes concernées ici à Tahiti. Comment expliquer ce faible taux de participation ?
Mere Fevre, membre de l’association Cousins Cousines : « On a honte de se mettre en avant et entre revendiquer et s’afficher, il y a quand même, on va dire, une différence. Ce n’est pas trop aussi dans notre façon de faire, à nous, de se mettre comme ça en avant. Donc c’est plus ça. On a honte, voilà. »
TNTV : Et quelle est la différence entre revendiquer et s’afficher ?
Mere Fevre : « Alors, on peut l’assumer au quotidien, sans forcément faire des parades ou aller le revendiquer devant la télé ou des choses comme ça.
Et d’ailleurs, j’aimerais aussi remercier ces personnes qui dans le quotidien le vivent, vivent leur amour, sous le regard des autres, même s’ils ne viennent pas à la marche. Eux participent aussi à cette inclusion-là. Comme il y a aussi, on va dire, cette nécessité de faire les marches. Comme l’a dit Karel, il faut que ceux qui nous regardent, ces jeunes qui nous regardent sachent que c’est possible de vivre cet amour-là et que ce n’est pas un amour interdit, bien au contraire. »
– PUBLICITE –
TNTV : Et est-ce que vous sentez que les mentalités évoluent ici à Tahiti sur les droits et la visibilité des personnes LGBTQIA+ ?
Mere Fevre : « Oui, les mentalités évoluent. Et d’ailleurs, c’est très bien. On a maintenant cette possibilité de pouvoir vivre cet amour de manière complète. Voilà. Donc, on voit de plus en plus de gens qui se tiennent la main. Quand on est amoureux, c’est ce qu’on a envie de faire, non ? Donc, pourquoi on n’aurait pas le droit de vivre cet amour-là ? Quand on est amoureux et qu’on veut rester avec la personne qu’on a trouvée, qui va partager toute notre vie, pourquoi on ne pourrait pas s’unir ? Pourquoi on ne pourrait pas aussi avoir tous, on va dire, ces droits-là ? Pourquoi ce serait réservé que juste à une catégorie de personnes ? »
TNTV : Mais alors, dans ce cas-là, selon vous, quels sont les freins principaux à cette acceptation ici ?
Mere Fevre : « C’est la honte et le manque d’amour. Voilà. C’est tout. »
TNTV : Alors, que dites-vous aujourd’hui à celles et ceux qui n’osent pas encore s’affirmer ou simplement participer à la Pride ?
Mere Fevre : « Alors, déjà, moi, j’aimerais parler aux parents. Déjà, d’une part, aimez vos enfants. Rassurez vos enfants, serrez vos enfants dans vos bras quand ils ont ce courage de venir vous dire que je suis lesbienne ou que je suis gay, peu importe. C’est déjà, ça commence par là, par les parents. Les parents vont donner cette force, cet amour qui va faire que ces enfants-là vont pouvoir, s’accepter. Quand je dis ‘aimez vos enfants’, ce n’est pas juste pour parce que c’est un gay ou une lesbienne. Non, c’est pour tous les enfants. Quand je dis qu’il y a un manque d’amour, c’est tellement évident. Après, pour ceux qui sont en couple, vivez votre amour. Ne tenez pas compte du regard des autres. C’est dur. Moi, j’ai fait un cheminement aussi. J’ai mis du temps à m’accepter. »
TNTV : Est-ce que vous avez subi des conséquences négatives quand vous avez fait votre coming-out ?
Mere Fevre : « C’est simple. À partir du moment où ma maman m’a dit « je t’aime telle que tu es, ça y est ». Le reste, ça ne compte pas. On peut me dire ce que vous voulez, ça m’est égal. Parce que ma maman, elle m’a donné cette force-là de m’accepter. Toutes les épreuves qui vont se présenter à moi, ça ne compte pas. Parce que j’ai au fond de moi cette force d’amour. C’est tout. »