TNTV : Vous venez d’être élue à la tête du CESEC après un scrutin serré, 23 voix sur 42 au terme de trois tours. Ce n’était pas donc gagné d’avance. Quelle lecture faites-vous de ce scrutin ?
Maiana Bambridge : « Il faut savoir qu’au CESEC, la loi prévoit que même les absents comptent pour le comptage global des voix. Donc aujourd’hui, nous avions neuf absents et sur les 42 présents, ce n’était pas la majorité des 42, mais la majorité des 51. C’est vrai que c’est un peu plus compliqué qu’à la normale, mais ceci étant, c’est la voix démocratique, c’est ainsi et puis on l’accepte sans aucun problème. Ce n’est pas un jeu, c’est quelque chose de sérieux, mais on va continuer, on va continuer. Ma prédécesseuse Voltina Roomataaroa Dauphin a occupé ce poste pendant deux ans de manière remarquable et donc on va chausser les mêmes chaussures ».
TNTV : Une femme élue à ce poste dans un univers encore très masculin, qu’est-ce que cela vous inspire ?
Maiana Bambridge : « Là, par contre, ça n’a pas beaucoup changé. L’univers masculin du CESEC qui peut être produit dans d’autres structures. Ce n’est pas compliqué, mais il faut pouvoir se faire entendre. Malgré tout, nous sommes suffisamment de femmes au CESEC pour que nos voix puissent être entendues. Après, ce n’est pas une question de sexe, d’hommes ou de femmes, c’est vraiment une question de débat d’idées. Et il est évident que nos idées sont certainement beaucoup plus difficiles, compliquées à faire entendre que les leurs. D’abord, ils parlent plus fort ».
TNTV : Vous êtes connue pour votre engagement de longue date. La vie chère et les familles en difficulté, sont des causes que vous portez depuis très longtemps. Est-ce que cela restera votre priorité ?
Maiana Bambridge : « Je représente la Fédération des organismes socio-éducatifs au CESEC. Cette fédération porte et gère 14 foyers d’accueil des sans voix, des plus démunis d’entre nous. Certes, c’est un sujet que je connais bien, mais à la tête de l’institution, ce sujet viendra enrichir les débats, mais pas que. Je dois porter la voix de l’ensemble des membres de l’institution, c’est-à-dire de toutes les préoccupations qui nous concernent et qui concernent la Polynésie. Pas simplement, malheureusement, les causes que je peux défendre avec mes amis ».
TNTV : Quels seront les grands défis que le CESEC devra relever dans les mois à venir ?
Maiana Bambridge : « Il faut savoir que nous sommes saisis, et c’est la loi qui l’impose, par des demandes d’avis du gouvernement ou de l’Assemblée. Donc ceux-là sont prioritaires. Au-delà de cela, nous avons la possibilité de procéder à des autosaisines. Nous votons des autosaisines dès l’instant où les saisines ne nous arrivent pas de manière excessive et qui nous permettent d’étudier nos autosaisines. Nous en avons eu deux sur les deux années qui viennent de passer, l’une sur les patentés et l’autre sur les inégalités en Polynésie que j’ai portée, dont j’étais rapporteuse et que mon collège a accepté de porter. Donc, au-delà de ça, qui sont des grands sujets de société, il y a d’autres sujets qui sont importants, qui sont intéressants. Mais malheureusement, nous sommes saisis aujourd’hui par exemple, de deux saisines qui sont arrivées et que nous allons étudier la semaine prochaine. Mais je souhaiterais effectivement que les membres du bureau qui m’accompagnent et les collèges puissent s’autosaisir de sujets encore plus importants pour la Polynésie ».
TNTV : Vous prenez la tête de la quatrième institution du Pays. Quelles relations souhaitez-vous entretenir avec le gouvernement et l’Assemblée ?
Maiana Bambridge : « Alors, nous avons des relations jusqu’à présent qui sont extrêmement constructives. J’en veux pour preuve que, d’abord à l’Assemblée, lorsque nos rapports, nos avis sont présentés, on a la possibilité d’aller directement en séance plénière pour les présenter. Et ça m’est arrivé récemment, de même que trois autres membres du CESEC qui portaient des avis. Donc c’est important d’avoir un lien direct avec les élus, quels qu’ils soient, pour se faire entendre et mettre le ton demandé à nos avis. Au niveau du gouvernement, dès que nous sommes sollicités, nous allons les rencontrer et puis nous sommes à disposition, nous sommes une institution qui donne des avis à disposition des élus de l’Assemblée et du gouvernement ».
TNTV : Votre prédécesseur Voltina Roomataaroa Dauphin estime que le CESEC devrait s’emparer de sujets beaucoup plus universels. Est-ce que vous partagez cette vision ?
Maiana Bambridge : « Absolument. C’est ce que nous avons fait récemment en participant à l’UNOC au mois de juin à Nice de cette année. Et nous avons décidé d’y participer parce que c’est un sujet qui nous concerne tous. Et d’ailleurs, je l’ai dit ce matin dans mon discours, notre présence a été importante et a permis aussi de faire entendre la voix des Polynésiens ».
TNTV : Comment envisagez-vous de rapprocher davantage les travaux du CESEC de la population afin que ses avis soient mieux compris et mieux relayés ?
Maiana Bambridge : « Nous avons fait récemment deux consultations populaires par Internet, l’une sur l’océan et l’autre sur la fin de vie. Et c’était extrêmement riche pour nous, nous membres du CESEC, parce que nous pouvons puiser dans ces avis, dans les personnes qui nous répondent. Nous en avons eu près de 800 pour la fin de vie, par exemple. Nous pouvons puiser des éléments qui nous auraient peut-être échappés et qui nous ont échappés. Et d’ailleurs, le résultat, c’est qu’ils répondent, mais on a estimé qu’ils n’étaient pas forcément correctement informés. Les questions étaient précises, mais la commande n’était pas suffisamment claire. Mais il fallait informer plus la population de manière qu’elle s’exprime plus fortement dans le cadre de nos interrogations. Et c’est une manière que l’on aura de continuer à communiquer plus d’autres que nous verrons ensemble avec les membres du Bureau. Mais il faut communiquer de manière que les avis du CESEC, quels qu’ils soient, puissent être portés à l’attention de la population ».