La position militaire de la France « renforcée » face aux bouleversements mondiaux

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    Invité de notre journal ce dimanche, le Contre-amiral Guillaume Pinget, commandant supérieur des forces armées en Polynésie française, se félicite de la stratégie de renforcement des Armées telle que planifiée par la loi de programmation militaire 2024-2030. "Les grands équilibres du monde sont en bouleversement. On ne s'attend pas à un retour en arrière" , prévient-il.

    TNTV : C’est jour de fête nationale avec le traditionnel défilé militaire. Quelle valeur célèbre-t-on ce jour-là ?
    Contre-amiral Guillaume Pinget, commandant supérieur des forces armées en Polynésie française : « Je crois que pour demain, le défilé, la première valeur que ça célèbre, c’est la cohésion nationale, la cohésion de la population avec son armée. Mais finalement, au-delà de l’armée et dans les armées la jeunesse est particulièrement mise à l’honneur (…). C’est aussi une date anniversaire puisque l’année 2025 marque à la fois le 80e anniversaire de la fin du deuxième conflit mondial. La valeur qui nous mobilise, c’est un devoir de mémoire et de reconnaissance envers nos anciens et de transmission et comment ne pas évoquer l’épopée glorieuse du bataillon du Pacifique et de nos anciens ici qui nous obligent aujourd’hui. Le deuxième anniversaire qu’on fête cette année, c’est le centième anniversaire du bleuet de France, qui est un bleuet qu’on porte à sa boutonnière au moment des fêtes nationales et qui symbolise la solidarité et la reconnaissance envers les anciens combattants et leurs familles, et ceux qui ont été touchés. Et puis le dernier message, c’est montrer que les armées sont prêtes à s’engager pour protéger et défendre la population et notre Pays.

    TNTV : Le rôle de l’armée en tant que vecteur de formation et d’insertion pour les jeunes, est-ce que c’est quelque chose d’important selon vous ?
    G.P : « Je pense que c’est très important parce que pour être militaire, il faut être en bonne condition physique. Donc on a besoin de jeunesse. On est dans une logique de flux. On a des gens qui rentrent et qui sortent tous les ans. Et je constate que les armées attirent les jeunes polynésiens et que la Polynésie est un vivier de recrutement qui est important pour nos armées. Les Polynésiens que j’ai eu l’occasion et l’honneur de commander sont toujours de très bons soldats, de très bons militaires. C’est une chance de les avoir dans nos armées. Le deuxième focus que je pourrais faire, c’est que tout le monde n’a pas vocation à s’engager dans les armées. Néanmoins, on peut être réserviste ou on peut passer au service militaire adapté pour s’insérer dans la société et trouver un métier par la suite » .

    TNTV : Le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, arrive mardi soir à Tahiti. Quel sujet avez-vous prévu d’aborder avec lui ?
    G.P : « Les sujets que j’aborderai avec lui sont plutôt les sujets pour lesquels j’apporte mon concours au Haut-commissaire, principalement la surveillance maritime, le sauvetage, les évacuations sanitaires et l’aide à la population. Donc j’aurai le plaisir d’accueillir le ministre au camp d’Arue où se trouve le centre maritime commun qui permet de surveiller la zone économique exclusive et de gérer les opérations de secours avec le JRCC. Nous irons voir le nouveau patrouilleur de la marine avec son drone sur la base navale de Fare ute. Puis nous rendrons à Faa’a, au groupement d’aéronautique militaire, où nous verrons les nouveaux avions de surveillance maritime, mais aussi les moyens de l’armée de l’air et de la marine qui servent pour les évassades et la surveillance de l’espace maritime polynésien » .

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    TNTV : L’avenir institutionnel qui se dessine autour de la Nouvelle-Calédonie aura-t-il des conséquences sur la présence de l’armée française dans ce futur État ?
    G.P : « C’est difficile de répondre à cette question compte tenu de l’accord qui est tout récent, dont je ne connais pas la teneur. Ce que je peux néanmoins vous dire, c’est qu’on peut se réjouir qu’un accord ait été trouvé et permette de retrouver une période de stabilité et de construction collective pour ce territoire » .

    TNTV : En février dernier, vous étiez à bord du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle. Vous avez eu le commandement de celui-ci entre 2019 et 2021. Ce bâtiment terminait une série d’exercices avec les armées japonaises et américaines. Avec la présidence Trump, les collaborations entre les armées françaises et américaines risquent-elles de se dégrader ?
    G.P :
    « Je peux vous dire que les relations entre chefs militaires restent excellentes, que les relations sont très bonnes, sont franches, que les Américains apprécient l’action de la France ici dans le Pacifique. Et d’ailleurs, les marines américaines viendront s’entraîner ici à la fin du mois d’août avec le régiment d’infanterie de marines du Pacifique-Polynésie » .

    TNTV : Face aux géants que sont la Chine et les États-Unis, aux tensions mondiales qui s’accentuent, la France a-t-elle vraiment les moyens d’être une puissance d’équilibre, en particulier dans la zone indo-pacifique ?
    G.P : « Ce que je peux vous dire là encore, c’est qu’aujourd’hui, j’ai les moyens de remplir ma mission ici, qu’avec l’effort budgétaire qui est consacré par la nation, on va être encore mieux capables de le faire et également d’agir dans la région auprès de nos alliés et partenaires et de nos voisins. Je pense que ça, c’est une chose à souligner. L’effort supplémentaire qui vient d’être annoncé par le président va renforcer notre position et notre aptitude à s’engager dans cet espace. Quand on discute avec l’ensemble, j’ai l’occasion de me rendre à un certain nombre de réunions internationales avec beaucoup de pays du Pacifique, mais aussi de l’Asie, de l’Asie du Sud-Est. Beaucoup de ces pays sont sensibles à la position de la France et sont extrêmement demandeurs de coopérer avec la France et avec ses armées » .

    TNTV : Le chef d’état-major français s’est exprimé il y a quelques jours sur la menace durable et très sérieuse que représente aujourd’hui la Russie pour l’Europe. Avec Poutine d’un côté, Donald Trump de l’autre, sans oublier les ambitions de la Chine. Est-ce que les grands équilibres du monde sont en plein bouleversement ? Quelles sont les conséquences pour la Polynésie ?
    G.P : « Ce que je peux vous dire, c’est que les grands équilibres du monde, effectivement, sont en bouleversement. Et pour faire référence à l’interview du chef d’état-major des armées que vous mentionnez, ils le sont durablement. On ne s’attend pas à un retour en arrière. Il y a une espèce d’effet cliquet et on ne reviendra pas en arrière. Il y a des enjeux de sécurité qui sont importants, qui fait que la France accélère son effort de défense. Et je pense que c’est le mouvement que nous suivons ici en Polynésie pour protéger la population, ce territoire, aider nos voisins et faire peser la voie de la France dans l’espace indo-pacifique (…). Si vous me permettez, pour terminer, je voudrais avoir une pensée particulière pour l’ensemble des militaires polynésiens qui servent sous le drapeau dans les armées françaises et pour leurs familles. Beaucoup d’entre eux fêteront ce 14 juillet loin de leur famille et loin de leurs proches, parfois sur les théâtres d’opération. Parfois, d’autres défileront à Paris ou dans d’autres métropoles de l’ensemble des territoires français. Et j’ai une pensée particulière pour eux et pour leur famille ce soir » .

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