TNTV : L’interdiction totale de l’importation et de l’usage des cigarettes électroniques vient d’être votée à l’Assemblée. Selon vous, était-ce nécessaire d’aller jusque-là ?
Eric Parrat : « C’est une décision des représentants du peuple. Elle a été votée à une très large majorité, donc il va falloir voir ce que ça donne. Mais on voit déjà les réactions qui se présentent et on sait que dans le domaine de la santé, toutes les polémiques nous font du mal ».
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TNTV : Devant le succès de la vape chez les jeunes, ne fallait-il pas simplement interdire sa consommation à partir d’un certain âge ?
Eric Parrat : « Chez les jeunes, c’était obligatoire. On se demande même comment ce type de produit a pu être vendu à des jeunes. C’est vraiment les plonger au cœur de l’addiction avec des doses de nicotine qui sont phénoménales. Je me base beaucoup sur le travail remarquable qui a été fait en Nouvelle-Zélande. On a beaucoup travaillé ça avec le ministère de la Santé. Ils ont fait beaucoup de prévention dans un premier temps et puis après ils sont passés à l’action en interdisant chez les mineurs. C’était vraiment une mesure indispensable ».
TNTV : Que sait-on des effets à long et moyen terme de la vape ?
Eric Parrat : « On n’a pas de recul. Ce sont des produits qui sont récents. Ce qu’on peut dire, c’est que chez des sujets dont l’organisme est en formation, chez des jeunes qui grandissent, tout est toxique sur le poumon. Vraiment tout. Il n’y a pas que le tabac, bien entendu, c’est la première évidence. La vape très certainement, mais on n’a pas de recul pour l’affirmer. Mais on sait que toute forme de pollution est toxique sur le poumon et peut déclencher énormément de maladies. Surtout dans un pays où on a plus de 20% d’asthmatiques, 40% de fumeurs. Il faut être très prudent chez les jeunes. On parle aussi de pollution atmosphérique, des particules fines, de diesel, les feux de brousse intempestifs qu’on met un peu partout, nos asthmatiques viennent se plaindre à nous en permanence ».
TNTV : Les vapoteuses ont néanmoins permis à certains fumeurs de ralentir leur consommation de tabac, voire d’arrêter de fumer. De votre point de vue, sont-elles effectivement une aide efficace ?
Eric Parrat : « Elle nous est décrite comme telle chez certains fumeurs, notamment ceux qui ont réussi à passer à de la vape sans nicotine, qui progressivement ont réussi à se sevrer totalement, un en tabac, deux en nicotine. Cela peut être un des effets pervers de la décision, puisqu’on peut craindre que certains reviennent au tabagisme. Cela nous poserait des problèmes ».
TNTV : Le CHPF veut devenir un hôpital sans tabac. Quelles sont vos alternatives pour accompagner ceux qui souhaitent arrêter ?
Eric Parrat : « C’est un enjeu dont on a parlé déjà sur ce plateau il y a quelque temps. Le CHPF a pris la décision de devenir un hôpital sans tabac. On remercie notre direction. On a déjà eu deux réunions, un groupe de travail qui se met en place. Le but est d’y aller par étapes progressives pour démontrer que nous, professionnels de santé, nous responsabilisons. Le premier but, c’est que nos professionnels de santé fumeurs se responsabilisent et progressivement les amener à se sevrer du tabagisme. C’est un long travail, ça va demander du temps. C’est un travail collectif, c’est de la responsabilité collective. La lutte contre le tabac, c’est une responsabilité collective ».
TNTV : Quels sont les défis majeurs pour les aider à arrêter de fumer ?
Eric Parrat : « Les principaux défis, c’est que le message de santé, tel que je le porte ce soir, il ne passe pas, en particulier chez les jeunes. Il faut vraiment trouver des méthodes nouvelles qui amènent la population à se responsabiliser collectivement pour diminuer dans un premier temps les chiffres du tabagisme et envisager une société sans tabac. Aujourd’hui, on est le 1er septembre, le début du Mois sans tabac. Allons-y ! ».
TNTV : La nouvelle loi va au-delà de la vape. Elle prévoit également le paquet neutre à l’horizon 2029 et l’interdiction de fumer sur les terrasses, les bars, les restaurants, les parcs, les plages. Comment jugez-vous l’efficacité de ces mesures ?
Eric Parrat : « Accompagnées d’un véritable programme de prévention, ce sont des mesures indispensables, bien entendu. Pour responsabiliser, il faut faire comprendre que, et notamment qu’il y a des non-fumeurs. Dans les espaces publics, les non-fumeurs ont aussi des droits au moins égaux à ceux des fumeurs. Donc personnellement, je n’aime pas même passer dans la rue et recevoir à l’intérieur de mes poumons des vapeurs de vapos, dont je ne sais pas ce qu’elles contiennent. Ça met en jeu la santé de tous, même des non-fumeurs. Le tabagisme passif, on connaît très bien ses conséquences en matière de cancer du poumon et notamment chez la femme. Je peux déjà annoncer que le 23 octobre, à la mairie de Paea, on va tenir une grande soirée d’information, gratuite et ouverte à tous, pour parler de la santé respiratoire de la femme. La femme est plus exposée que l’homme à ces méfaits du tabac, de la vape. On le sait depuis fort longtemps ».