La TDL rénovée, imparfaite mais adoptée par l’Assemblée

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Adoptée à 46 voix pour en session budgétaire, avec le soutien de l’opposition, la taxe de développement local rénovée (TDLR), prévue pour entrer en vigueur début 2026, vise à encadrer la protection de l’industrie et de l’artisanat polynésiens. Un toilettage visant à limiter les effets de rente, simplifier les taux et conditionner davantage les avantages accordés aux producteurs locaux. Mais son impact réel sur les prix continue d'interroger l'opposition.

Considérée comme un outil de soutien à l’industrie locale, la TDL fait l’objet d’une refonte censée mieux encadrer son application. Problème : son efficacité reste difficile à évaluer. C’est l’une des premières critiques formulées par l’élue Tapura Huiraatira, Tepuaraurii Teriitahi, pour qui « les effets macroéconomiques réels de la TDL sur l’économie et l’emploi ne sont pas documentés. Alors, le juste équilibre est difficile à trouver», note-t-elle.

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Elle décrit le mécanisme de la TDL comme une protection minimaliste, mais indispensable : « La TDL, c’est lorsqu’un produit arrive en Polynésie dès lors qu’en Polynésie même, on peut trouver l’équivalent, on lui applique une taxe qui fait que mécaniquement, le prix de ce produit augmente… ceux qui ont le courage de créer une industrie locale ne seraient pas compétitifs parce que forcément, leur production serait plus chère ».

 

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Pour elle, l’enjeu n’est pas de « sacrifier le pouvoir d’achat », mais de choisir un équilibre « gagnant-gagnant ». Elle rappelle aussi que les études nécessaires pour mesurer les effets réels de cet outil n’ont jamais été menées jusqu’au bout, malgré une recommandation ancienne : « La seule étude partielle remonte à l’époque du gouvernement de M. Gaston Flosse en 2009 (…) cette étude concluait déja que la taxe de développement locale est un outil utile (…) mais qu’elle devait être recentrée et allégée sur plusieurs produits. »

« Pour moi, tout ce qu’elle a de différent, c’est qu’elle s’appelle rénovée » , ironise l’élue, qui reconnaît toutefois l’effort de concertation : « On semblait avoir obtenu un consensus, puisque lors de la dernière réunion, on avait les industriels, les consommateurs, les importateurs… et tout le monde semblait être d’accord pour jouer le jeu. »

« Un moindre mal » pour les filières locales

Nuihau Laurey, pour les non-inscrits, a lui aussi soutenu le texte, tout en défendant une alternative plus libérale, fondée sur des exonérations ciblées plutôt que sur une taxation généralisée. « Au lieu de baisser la compétitivité des produits importée (…) on diminue la compétitivité des produits importés avec, aux conséquences, un renchérissement des prix en Polynésie », analyse-t-il.

Il critique un modèle interventionniste qui, selon lui, entraîne mécaniquement une inflation administrative et fiscale. « Les services en charge des contrôles vont demander des ressources supplémentaires qui vont à la fin se traduire par des demandes de création de postes et qui vont ensuite se traduire par la nécessité d’augmenter les impôts. On est dans un cycle qui n’est pas du tout vertueux », alerte-t-il.

« On a ce qu’on a (…) on considère que ce texte est quand même meilleur que le texte qui existait parce qu’il va essayer de limiter les effets du gain » , a-t-il conclu.

Le ministre de l’Économie, Warren Dexter, assume le maintien d’un système de taxation plutôt que d’un soutien direct aux entreprises. Il estime que l’alternative serait plus coûteuse. « Un système d’aide directe, par exemple, la prise en charge des charges sociales, on parle de 4 000 salariés, ça va coûter environ 2 milliards de francs. C’est-à-dire le produit humain de la TDL. »

Pour lui, la TDLR, « pas parfaite » , demeure un « moindre mal » dans une économie insulaire peu compétitive, notamment face à l’Asie. « On reste dans un système où on taxe les importations et, indirectement, effectivement, on surenchérit les prix à l’importation, mais je dirais que c’est un moindre mal pour la protection des filières locales, parce que je pense que ça va rester une nécessité pour un bon moment. »

Enfin, l’ancien président Édouard Fritch a alerté sur la nécessité d’une protection accrue de l’artisanat, déjà évoquée dans les débats sur la TDL ces derniers mois. « Ce que nous voulons protéger, c’est effectivement l’activité artisanale. Alors, la question, c’est est-ce qu’on ne peut pas, pour une meilleure compréhension, réduire ce nombre de taux ? (…). Si tous les produits artisanaux qu’on veut protéger sont tous à 80 %, effectivement, la diversité des taux peut ne pas se justifier » .

Il suggère de simplifier les taux et de renforcer la taxation sur les produits finis importés, pour éviter la concurrence industrielle de masse. « Il y a certains tikis qui arrivent, ça sort de machine, alors que nos artisans passent du temps, ils mettent de l’âme dans les produits qu’ils réalisent… est-ce qu’il ne faut pas plutôt privilégier la taxation forte des produits terminés ? (…) Le ministre vient de nous dire qu’on est dans un stade expérimental, mais il faut se dépêcher, parce qu’on va recevoir bientôt les Jeux » .

Le projet a finalement été adopté à 46 voix pour, et sera appliqué progressivement à partir du 1er janvier 2026.

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