La réforme des PPN reportée « courant 2026 » , annonce Warren Dexter

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    Le ministre de l’Économie, du Budget et des Finances, Warren Dexter, annonce des aides ciblées pour les ménages modestes, ainsi qu’une révision plus large de la fiscalité prévue en 2026. Il répond aussi aux critiques du Medef, et maintient qu'il faut "transférer la pression fiscale de l'indirect vers le direct" pour établir une véritable équité fiscale. Interview.

    TNTV : Votre projet de loi pour les PPN prévoit de donner 800 millions de francs aux importateurs pour qu’ils baissent leurs prix de base. Comment le consommateur verra les prix baissés ?
    Warren Dexter, ministre de l’Économie, du Budget et des Finances :
    « Effectivement, c’est une des mesures que nous avons prévues au titre de la lutte contre la vie chère qu’on va mettre en place à partir de 2026. Il y a deux leviers. Le premier (…) c’est que le Pays prenne en charge une partie des coûts de transport, de ces fameux PPN, pour avoir un effet baissier à la sortie (…). Comme vous le savez, les PPN, les marges sont réglementées. Il n’y a pas de taxe dessus. La prise en charge que l’on fait au niveau du transport va forcément se répercuter à la baisse à la sortie, puisque tout est réglementé, du début à la fin. C’est pour ça que nous avons pris le risque de soutenir cette filière PPN » .

    TNTV : Quand est-ce que ça sera appliqué ?
    W.D :
    « Courant 2026, parce que le deuxième volet est un peu plus compliqué. On va proposer une remise supplémentaire pour les ménages nécessiteux. Donc, ça va se faire sous forme de cartes qui vont être gérées à partir d’une plateforme (…). Déjà, les PPN, ce sont des produits à marges assez resserrées (…). Cela va occasionner une remise supplémentaire pour ceux qui en ont vraiment besoin. Donc, si vous voulez, là, on est aussi dans l’axe de politique générale du gouvernement de réorienter les aides publiques vers ceux qui en ont vraiment besoin » .

    TNTV : Quels seront les critères pour avoir cette carte ?
    W.D :
    « En fait, c’est les critères de la DSFE, c’est-à-dire tous les ménages nécessiteux (…). On parle de 40 000 personnes qui seront potentiellement éligibles. Donc, c’est aussi un point qui est en discussion avec les professionnels » .

    TNTV : Si l’importateur touche l’aide mais ne baisse pas le prix, qu’est-ce qu’il risque ? Est-ce qu’il y aura aussi des contrôles ?
    W.D :
    « Il y aura forcément des contrôles puisque les remboursements ne pourront se faire qu’avec le justificatif du paiement de ces fameux CAF avec le transport d’assurance-fret. C’est sur cette base-là que nous rembourserons » .

    TNTV : Quels seront les risques pour celui qui ne respecte pas justement la baisse de prix en touchant cette aide-là ?
    W.D :
    « C’est impossible de ne pas respecter parce que les prix sont réglementés. Je peux vous dire que la DGAE suit de près le respect des réglementations, notamment sur les plateformes de marge. C’est également cette même DGAE qui va gérer le remboursement des importateurs sur la base de production justificative » .

    TNTV : Sur les 67 PPN référencés, seuls 14 seraient concernés par cette aide. Est-ce qu’on peut déjà savoir quels sont les produits ?
    W.D :
    « Oui, je peux vous dire. Pourquoi que 14 ? C’est vrai que ça ne représente pas beaucoup en nombre par rapport à les 67. Mais en fait, on vise là ce qu’on appelle les PPN essentiels, c’est-à-dire ceux qui sont en fait les plus consommés. Donc en nombre, ça ne représente pas beaucoup. Mais je peux vous dire qu’en valeur, ça représente la majorité. Vous avez les produits qui sont les plus couramment consommés. Vous avez évidemment le lait, le beurre, la farine. Vous aurez dedans l’huile. Vous aurez nos fameux aussi sao et chesdale. Vraiment les produits qui sont très prisés de nos Polynésiens. C’est sur ceux-là qu’on va attribuer une aide supplémentaire » .

    TNTV : Alors si le but est de baisser le prix du chariot, pourquoi en laisser autant de côté ?
    W.D :
    « Parce que justement, c’est compliqué budgétairement. À un moment donné, il y a des limites à la prise en charge budgétaire. 800 millions, c’est déjà pas mal pour prendre en charge une partie des biens qui sont les plus consommés et qui sont donc les plus prisés par les Polynésiens à petit moyen. Donc on a vraiment voulu, en tout cas, le faire dans un premier temps, cibler cette aide surtout sur les populations qui en ont le plus besoin » .

    TNTV : On est sur des produits importés. Est-ce qu’il est possible de faire baisser aussi les prix des produits locaux ?
    W.D :
    « Oui, c’est prévu dans le second volet du texte là, c’est-à-dire le fameux prix remisé. On va également viser des produits locaux. Parce qu’effectivement, ça a été une demande forte du Président. On n’avantage pas que les produits importés, mais on favorise également les produits locaux » .

    TNTV : Dans le même genre, il y a le dispositif Tama‘a Maitai, l’équivalent des tickets restaurant. Où en est ce projet ?
    W.D :
    « C’est un dossier qui est entre les mains de notre ministre en charge de l’agriculture, puisque c’est lui qui le porte. Donc effectivement, c’est la transposition du modèle du ticket restaurant. Il s’agit d’inciter les employeurs à prendre en charge une partie du repas de midi de leurs salariés, et puis c’est une incitation sous forme de réduction d’impôts. C’est-à-dire que le Pays va contribuer au financement de ce dispositif en allégeant les impôts des employeurs qui viennent bien rentrer dedans » .

    TNTV : La réforme de la TDL a aussi pour vocation à faire baisser les prix. Où en est ce chantier ?
    W.D :
    « On a beaucoup présenté ce projet comme une lutte contre la vie chère, mais moi je ne serais pas aussi catégorique. On est encore en plein dans les chantiers de toilettage. Et on s’aperçoit qu’il y a beaucoup de produits qui aujourd’hui ne sont pas taxés, alors qu’ils devraient l’être parce qu’il y a une production locale concurrente. L’un dans l’autre, ça se peut que les toilettages qu’on est en train de faire, c’est-à-dire sortir des produits qui ne devraient pas être taxés à l’importation, et en remettre d’autres, c’est possible que finalement ça n’aie pas d’effet baisse de prix sur ce terrain-là. Il ne faut pas oublier que la TDL, ce n’est pas un outil pour faire baisser les coûts de la vie, c’est simplement pour protéger les industries locales, pour tenir compte du fait que ce qui est apporté est plus compétitif en termes de prix, puisque ça vient des grands pays où c’est moins cher » .

    TNTV : On reste sur le pouvoir d’achat avec cette déclaration du MEDEF qui invite le pays à baisser ses impôts au lieu de les augmenter. Que répondez-vous à cette critique de fond ?
    W.D :
    « Je suis en total désaccord, parce que quand il dit que nous attribuons la responsabilité de l’inflation aux chefs d’entreprise, c’est faux, puisque moi, je me suis déclaré plusieurs fois comme étant un fervent défenseur des entreprises, et j’ai indiqué à plusieurs reprises que l’inflation était d’abord importée. Comme on est très dépendant des importations, ce qu’on achète à l’extérieur, c’est déjà cher, comment voulez-vous que quand ça arrive ici, ce ne soit pas cher ? Une des solutions, c’est effectivement qu’on sorte de cette logique d’être trop tributaire des importations, pour essayer de développer l’économie endogène. Quand (Steeve Hamblin) dit qu’il n’y a pas eu de mesure de baisse de la fiscalité, il semble oublier, par exemple, que l’année dernière, la fiscalité sur les transactions immobilières a baissée de 40%. Et ça, ce n’est pas négligeable. J’ai également diminué le droit de douane sur les produits originaires de l’Océanie, notamment de Nouvelle-Zélande et d’Australie. Il y a un tas de mesures qu’il n’ignore pas, c’est que j’envisage de baisser substantiellement la fiscalité indirecte dans le cours de 2026. On en a discuté. Moi, ce que je ne comprends pas dans les oppositions, dans les procès d’intention que me font les chefs d’entreprise, c’est qu’il y a eu de la concertation. On s’est vus 4 ou 5 fois depuis le début de l’année. J’ai fait connaître mes intentions. Je veux même vous dire qu’en août, j’ai été applaudi pour la présentation de mes réformes. Et juste après, je reçois un courrier pour dire qu’ils sont en totale opposition. Je pense que derrière tout ça, c’est tout simplement qu’ils sont devenus très frileux depuis qu’il y a eu la réforme du RNS » .

    TNTV : Le Medef parle d’une chasse aux sorcières. Comment les rassurer ?
    W.D :
    « C’est tout l’exercice. J’ai répondu au courrier à charge qu’ils avaient contre moi pour dire que je vais tenter de renouer le dialogue. Et les réformes que j’envisageais à la fin de cette année, je vais les repousser en 2026 pour plus discuter avec eux » .

    TNTV : Est-ce qu’on peut s’attendre à des ajustements de cette réforme fiscale en fonction des rencontres que vous prévoyez ?
    W.D :
    « Bien sûr, ça sera tout l’objet (…). Dans ce pays, on a un gros paradoxe. C’est qu’au plan économique, on est le numéro 1 dans tous les Outre-mer. Vous savez que ça fonctionne très bien. Mais au plan des inégalités sociales, on est les derniers. C’est là où il y a le plus d’inégalités sociales. Et au plan fiscal, ça se traduit par le fait qu’il y a trop de fiscalité indirecte. L’indirect, c’est les taxes de douane et TVA qui frappent un peu tout le monde de la même manière. Le pauvre comme le riche. Donc je dis depuis le début que pour établir plus d’égalité, il faut transférer la pression fiscale de l’indirect vers le direct. Donc ce que je propose, c’est d’augmenter la fiscalité sur les entreprises là où il y a matière et de diminuer à due concurrence la fiscalité indirecte pour établir une certaine égalité » .

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