L’affaire illustre une nouvelle fois la spirale de violence dans laquelle sont plongées les populations fragiles de la capitale. Ce lundi, au tribunal correctionnel, Émile*, un quadragénaire sans domicile fixe au casier judiciaire déjà bien rempli – onze condamnations, dont plusieurs pour des faits de violences – a dû répondre de coups particulièrement brutaux portés contre un autre SDF, Naea.
Les faits remontent à une nuit agitée, le 17 septembre dernier, dans un squat situé près du marché de Papeete, où une dizaine de personnes se trouvent au moment des faits. Selon les témoignages, une dispute éclate après que Naea a importuné des femmes, puis tenté de voler les savates d’un autre homme endormi. Dans un premier temps, Émile, ivre, le chasse, avant de lui asséner plusieurs coups de poing, puis deux coups de pied au visage. Naea s’effondre.
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Alertés, les gendarmes le découvrent inconscient, gisant en position latérale de sécurité et saignant abondamment de la bouche.
Transporté à l’hôpital dans un état grave, il a subi de multiples fractures au nez et à la mâchoire, ainsi que de lourds hématomes au visage. Pendant quelques heures, on craint le pire. Il est finalement opéré, et s’en sort avec 30 jours d’ITT. Lui aussi alcoolisé, il ne se souvient de rien. Malgré ses blessures, il décide de ne pas porter plainte.
À la barre, Émile minimise les faits. « Je n’ai pas de problème d’alcool » , soutient-il, même s’il a consommé en grande partie une bouteille de rhum, le soir des faits. Et même s’il reconnaît ensuite que ses coups « très forts » auraient pu être mortels.
Déjà incarcéré à plusieurs reprises, sorti de prison en mai dernier, Émile confie qu’il aimerait partir en métropole pour sortir de cette spirale. « Pourquoi pas » , répond la procureure, soulignant que les dispositifs d’accompagnement en Polynésie ont, dans son cas, montré leurs limites. Pour elle, ces violences « font partie de (sa) personnalité intrinsèque » et sont totalement « disproportionnées » . Elle requiert trois ans de prison ferme, assortis de la révocation de six mois de sursis.
Des réquisitions suivies à la lettre par le tribunal, dans sa décision finale.