Un protagoniste surnommé « Escobar » , de l’argent liquide injecté dans des comptes puis ventilé sur d’autres via Revolut, pour quelque 30 millions, triche au kikiri… Le décor planté sur le dossier jugé ce lundi en comparution immédiate avait tout de la bonne production locale.
Aux côtés du trentenaire : trois prévenus. Un couple et la propriétaire d’un snack suspectés d’avoir contribué à blanchir et profité du système dont « Escobar » serait la « lessiveuse professionnelle » , selon la procureure. Cet assistant de logistique, payé 200 000 francs mensuels, a expliqué que pour arrondir ses fins de mois il proposait, sur Facebook, des services d’achat-revente de deux roues et de voitures… et un curieux service de « recharge » de comptes Revolut, qu’il a confusément expliqué au président du tribunal.
Moyennant une commission de 5 à 10%, il recevait d’importantes sommes d’argent en cash, qu’il encaissait sur son compte et virait par la suite sur son propre compte Revolut, avant de le redistribuer sur les comptes Revolut de ses « clients ». Problème : la provenance du cash n’était jamais clairement établie, et il ne semblait pas s’en inquiéter.
C’est le cas des sommes versées sur le compte Revolut d’une jeune femme parmi ses connaissances : près de 14 millions de francs, gagnés par le compagnon de cette dernière, qui ont permis d’importants travaux dans une maison, ou encore l’achat de véhicules neufs et d’appareils de musculation en quantité. L’argent est le fruit d’une série heureuse aux jeux – le bingo, le kikiri, les combat de coqs – depuis deux ans, explique-t-il, bien aidé par un peu de « triche » . La tenancière du snack, elle, s’est vu octroyer un important prêt d’Escobar pour lancer son activité dans la perle. Sans qu’une contrepartie lui soit clairement exigée, et sans qu’elle demande, elle aussi, l’origine de l’argent.
Car ce que les enquêteurs ont suspecté, sans pouvoir toutefois le prouver, était qu’il venait de la vente de produits stupéfiants. Le dossier, assure la procureure, « suinte » cette piste – d’autres personnes suspectées de trafic de produits stupéfiants gravitant autour des prévenus attendent encore d’être jugés. Ce qui suscite l’ironie de l’avocat du principal concerné, pour qui le « dossier Escobar » n’est rien d’autre qu’un stratagème « idiot » de son client pour gagner quelques sous et rouler en véhicules neufs, avant de les revendre au même prix. Un film loin de la grosse production, donc.
Après en avoir délibéré, le tribunal a finalement condamné « Escobar » à 18 mois de prison avec sursis et 3 millions de francs d’amende, moins que les 2 ans et 5 millions requis par la procureure. Les coprévenus, eux, ont été condamnés à des perines de 6 à 18 mois de prison avec sursis.