TNTV : Pour quelles raisons la société Gaz de Tahiti a décidé d’engager des poursuites judiciaires contre Managaz et Mana Ito ?
Laura Siu : « Il y a des actes que l’on estime de concurrence déloyale. Donc, nous déposons ce recours au tribunal du commerce en vue de qualifier les actes de dénigrement dont nous avons été victimes (…), les prix anormalement bas qui se poursuivent aujourd’hui et les publicités mensongères ».
TNTV : Avez-vous eu des contacts avec vos concurrents avant d’entamer cette procédure ?
Laura Siu : « Nous avons eu des contacts par courrier principalement pour réorganiser notre activité ensemble ».
TNTV : En quoi votre activité est aujourd’hui impactée ?
Laura Siu : « L’arrivée du concurrent a bien évidemment nécessité qu’on se réadapte. On a réadapté notre logistique. On s’est amélioré également dans nos façons de faire, dans notre service client. On s’est ajusté. Maintenant, ce qui est certain, c’est qu’on ne peut pas continuer à œuvrer pour les Polynésiens dans des conditions que nous estimons déloyales avec des pratiques de prix anormalement bas. Donc aujourd’hui, on dépose un recours auprès du tribunal pour que la justice tranche ».
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TNTV : Qu’attendez-vous concrètement de ce recours ?
Laura Siu : « Nous espérons la cessation de ces pratiques déloyales pour rétablir une concurrence saine, loyale, et durable dans le temps pour assurer notre pérennité, pour protéger nos emplois et surtout nos compétences, et enfin, continuer d’assurer une expertise, un conseil pour la population ».
TNTV : Quels postes sont les plus lourds à assumer ? La maintenance de vos infrastructures ?
Laura Siu : « La maintenance des infrastructures fait partie intégrante de notre activité, mais c’est surtout la formation de notre personnel qui nécessite d’être toujours renouvelée. On s’appuie sur des gaziers métropolitains et également sur des experts locaux pour toujours être à la pointe du métier, respecter les normes très strictes de ce métier de gazier. C’est ce qui a un coût important ».
TNTV : Cette concurrence déloyale, selon vous, concerne aussi les îles ?
Laura Siu : « Oui. Je crois que Managaz est présent dans les 5 archipels, sur 13 îles, il me semble. Nous, on est présent sur toute la Polynésie ».
TNTV : Vous aviez lancé ces dernières années de nouvelles bonbonnes légères. Cela ne vous a pas permis de rééquilibrer les parts de marché ?
Laura Siu : « Non. Nous avons effectivement commercialisé les premières bouteilles composites il y a 20 ans, de petites capacités et, en 2018, des plus grandes capacités. Nous avons fait le choix de ne pas développer cette gamme de produits parce que ce sont des bouteilles plus fragiles que les bouteilles en acier. C’est également du plastique et nous avons fait le choix de ne pas investir massivement dans ces bouteilles parce qu’il y a des enjeux environnementaux dont il faut tenir compte aujourd’hui. Et l’acier répond beaucoup mieux à ces enjeux pour un territoire comme le nôtre isolé dans le Pacifique ».
TNTV : On pourrait aussi vous rétorquer que vendre moins cher que son concurrent fait partie du jeu commercial…
Laura Siu : « Il est important de rappeler que le marché du gaz était déjà en décroissance avant l’arrivée de Managaz. Par ailleurs, les prix sont fortement réglementés et imposés par le Pays, ainsi que les marges. Nous devons faire avec ce système réglementaire et c’est important également de dire que Gaz de Tahiti n’est pas contre la concurrence, mais on est contre les actes déloyaux de concurrence. Surtout, derrière nos prix, il y a toutes les opérations que nous menons en termes de formation, de traitement, de contrôle qualité, d’astreinte, et de service au client qui ont un coût ».
TNTV : Avez pris attache avec le Pays sur le sujet ?
Laura Siu : « Oui. Chaque autorité qu’on a saisie a son rôle dans cette affaire. Il faut faire évoluer ce marché qui était prévu pour un opérateur. C’est pour cela, qu’aujourd’hui, on adresse à l’autorité judiciaire ce sujet de concurrence déloyale, mais on est également en contact avec le ministère de l’Économie et des Finances, la DGAE -La direction Générale des Affaires Économiques, Ndlr-, et l’APC -l’Autorité Polynésienne de la Concurrence, Ndlr- pour faire évoluer la réglementation ».