Labelliser la Vanille de Tahiti pour se « protéger contre les tentatives de fraude d’autres pays »

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Une nouvelle étape s’ouvre pour obtenir une Indication Géographique Protégée (IGP) pour la filière vanille. Après le dépôt du dossier en août par l'Association interprofessionnelle de la Vanille de Tahiti, une enquête publique est prévue pour bientôt. Cette labellisation s’impose selon son président Gilles Tefaatau qui était l’invité du journal de TNTV, ce lundi. « Il faut se protéger contre les tentatives de fraude menées par d'autres pays », dit-il. Interview

TNTV : Votre association porte ce projet. Que va permettre l’obtention de cette IGP et quel intérêt pour les acteurs de la filière ?

Gilles Tefaatau : « L’IGP, c’est un signe de qualité. Ça va au-delà des professionnels. C’est véritablement une priorité que nous nous sommes donnés qui est de protéger, tout d’abord sur le plan local, bien sûr, sur le plan national, européen, international : ‘Vanille de Tahiti’. C’est le premier objectif que nous sommes fixés. Et ça sert à cela l’IGP ou l’AOP ou l’indication géographique protégée. Donc protéger ‘Vanille de Tahiti’. Contre quoi ? Contre d’autres pays qui produisent la même vanille que nous. Il faut citer la Papouasie-Nouvelle-Guinée, l’Indonésie, la Thaïlande ».

 

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TNTV : Où nous situons sur le marché international ?

Gilles Tefaatau : « Il faut savoir que la vanille Bourbon est produite par le plus gros producteur : Madagascar. 2000 tonnes par an. Nous, nous produisons la Tahitensis pour une trentaine de tonnes par an. On est loin des 1000 tonnes produites avant l’installation des essais nucléaires. Mais malgré tout, avec ces 30 tonnes, il est indispensable que nous puissions d’abord protéger ce label Vanille de Tahiti qui nous appartient. Pas à nous seulement les professionnels, mais qui appartient au pays. C’est un patrimoine qu’il faut protéger. Et c’est la raison pour laquelle j’ai été soutenu, nous avons été soutenus, par le gouvernement, par les membres de l’Assemblée pour pousser, pour faire aboutir ce dossier ».

TNTV : Une nouvelle réglementation s’impose-t-elle ?

Gilles Tefaatau : « Il y a un cahier des charges qui est très strict et qui permet à un producteur d’adhérer au label IGP, de suivre les indications, tant sur la production, que sur la préparation et sur l’exportation. Donc il y a un cahier des charges bien précis que nous avons finalisé avec la Direction de l’agriculture la semaine dernière. Et qui sera présenté au public lorsque l’enquête de reconnaissance locale sera lancée par la DAG dans le courant du mois de janvier ».

TNTV : Quel retour avez-vous des acteurs de la filière ? On parle d’opposition éventuelle…

Gilles Tefaatau : « Franchement, pour l’instant, je n’ai pas reçu d’opposition. Et je ne vois pas en quoi on peut s’opposer à une démarche collective ».

TNTV : Une réglementation peut, peut-être, être un frein pour les petits producteurs ?

Gilles Tefaatau : « Non, parce que justement, cette démarche de l’IGP, c’est une démarche volontaire. Cela veut dire que… Moi, par exemple, je suis producteur depuis 10 ans. Eh bien j’ai le choix d’opter pour la culture traditionnelle, comme nous le faisons jusqu’à présent, et j’ai le choix aussi d’opter en même temps pour le label IGP ».

 TNTV : Il est nécessaire de professionnaliser la filière ?

Gilles Tefaatau : « Oui. Eh bien il faut se professionnaliser la filière. Il faut se protéger contre les tentatives de fraude menées par d’autres pays qui font du mélange, par exemple de la Bourbon avec la Vanille de Tahiti, et qui présentent leur production comme étant une vanille produite à Tahiti. Je prends par exemple la vanille produite en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Lorsqu’ils commercialisent cette vanille, ils appellent « Tahitian vanilla ». Or, le consommateur a l’impression que cette vanille, elle est produite ici et préparée en Polynésie ».

TNTV : Qui contrôle que les règles sont appliquées ?

Gilles Tefaatau : « Il y a un organisme de contrôle qui se fera lors de l’adhésion à cette démarche. Et si jamais il y a des tentatives de fraude, nous sommes en droit de porter cette affaire devant un tribunal international ou à l’Union européenne pour pouvoir justement protéger notre produit qui est exceptionnel ».

TNTV : Existe-il aussi un intérêt financier ?

Gilles Tefaatau : « Oui. Nous savons aujourd’hui que tous les produits, au-delà de la vanille, tous les produits qui sont présentés au Salon d’agriculture à Paris en février bientôt, que ce soit dans le fromage, que ce soit dans le vin et tout cela, dès lors qu’ils présentent un label à AOP ou IGP, vous savez que les prix forcément suivent ».

TNTV : Il y aura une hausse de prix…

Gilles Tefaatau : « Une hausse des prix vis-à-vis du client et tant mieux pour les producteurs que nous sommes, puisque nous nous engageons dans une démarche de qualité. Et tout cela sera contrôlé au travers de ce cahier des charges ».

TNTV : La prochaine étape, c’est cette enquête publique qui va démarrer bientôt. J’ai ce petit fascicule entre les mains que vous nous avez apporté. Que contient-il ?

Gilles Tefaatau : « C’est une enquête publique qui est lancée par la Direction de l’agriculture dans le courant du mois de janvier. Elle va concerner bien sûr prioritairement les professionnels, mais aussi le grand public, puisque ce guide, ce flyer, répond à des questions que nous nous posons sur l’IGP. C’est quoi une IGP ? A quoi elle sert ? Et ça a été traduit également en tahitien, pour que nous puissions toucher le grand public, pour que cette démarche soit soutenue par l’ensemble du pays. Donc je ne vois pas comment on peut s’opposer à une protection d’un patrimoine qui nous appartient. On ne peut pas s’y opposer ».

TNTV : Quelles sont les prochaines étapes après cette enquête publique ? Et quand démarre-t-Elle ?

Gilles Tefaatau : « Normalement, d’après les informations récoltées auprès de la DAG, dans le courant du mois de janvier, pour deux mois. Donc il y aura un cahier qui sera mis à la disposition du public, des professionnels, et qui auront aussi la possibilité de consulter le cahier des charges, dans lequel il y aura toutes les démarches à suivre pour obtenir le label IGP. Et après cela, une fois cette reconnaissance faite, nous irons à Paris défendre la reconnaissance nationale, européenne et internationale ».

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