À Hiva Oa, le projet de Musée marquisien toujours en tractations

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    Y aura-t-il un musée des Marquises à Hiva Oa ? Le centre culturel d’Atuona propose déjà quelques vestiges, non loin des reproductions de Paul Gauguin et de l’avion de Jacques Brel. Mais la commune veut un vrai musée et, pour elle, le Pays freine le projet.

    Manuel Valls a entamé son premier déplacement hors de Tahiti, à Hiva Oa, dans l’archipel des Marquises, ce jeudi. Accueilli par les hakaiki, un traditionnel Mave Mai et d’impressionnants guerriers marquisiens, le ministre des Outre-mer a visité les tombes de Jacques Brel et Paul Gauguin.

    Derrière cet accueil chaleureux, l’atmosphère demeurait électrique  au centre culturel d’Atuona, où le ministre a été pris à témoin d’un désaccord entre la commune et le gouvernement polynésien. Au cœur du différend : la création d’un Musée marquisien, baptisé Te Ohoaukiu o Hiva Oa (‘là où sont conservés les objets importants de Hiva Oa’, en marquisien).

    Si le projet est financé aux deux tiers , à hauteur de 63 millions de francs par l’État et 63 millions par la commune, cette dernière estime que la participation du Pays tarde. « On est un peu en difficulté actuellement. On a reçu les fonds de l’État. Les fonds communaux et les fonds de l’État, on les a déjà perçus depuis un an. On attend la quote part du Pays, mais bon, c’est un peu difficile » , avance la maire de Hiva Oa, Joëlle Frébault.

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    Moetai Brotherson invoque une impasse statutaire et l’impossibilité de faire venir un conservateur, en l’état. « Ça ne coince pas au niveau du gouvernement, ça coince tout simplement parce que statutairement, il y a une répartition des compétences qui est bien claire. La compétence culture, elle est au Pays. Il y a aussi des contraintes administratives très strictes, notamment, au niveau de la gestion du contenu muséographique, il faut un conservateur. Aujourd’hui, il y a un seul conservateur en Polynésie, c’est celui qui est au musée des îles » . 

    Et le président du Pays de conclure. « Il n’y a pas de dérogation possible. Il y a par contre l’utilisation de certains articles du statut que l’on peut mettre en œuvre. Mais il faut que tout cela soit encadré. C’est en cours » .

    Un patrimoine à sauver… et à faire revenir

    Car le temps presse : les prestigieux musées de Bâle et de Cambridge ont accepté de prêter à Hiva Oa près de 200 objets marquisiens, à condition que le Musée soit créé. Ces trésors – casse-têtes, coiffes, tikis et ornements du XVIIIᵉ siècle – pourraient retrouver leur terre d’origine après des siècles d’absence.

    Le musée viendrait enrichir un centre culturel qui expose aujourd’hui surtout des reproductions de Gauguin et l’avion de Brel, Jojo. La dernière salle, consacrée à l’art marquisien, laisse peu de place et peu de mise en valeur aux pièces locales.

    Au-delà du musée, un symbole d’autonomie

    Projet d’aéroport international, engagement pour le classement de l’archipel au patrimoine mondial, et maintenant le projet de musée, dont le nom traduit une tension latente entre les Marquises et Tahiti. « Nous réclamons nos objets qui sont à Tahiti et c’est d’ailleurs pour ça que Tahiti ne veut pas qu’on ait notre musée, parce qu’au musée de Tahiti et des îles, ce sont surtout des objets marquisiens qui sont exposés » assurait Toti Teikihuupoko, le président de l’académie marquisienne, dans un entretien accordé au Monde il y a 6 mois.

    Fiers de leur identité et majoritairement autonomistes, les Marquisiens veulent moins dépendre de Tahiti, comme le montre aussi leur projet d’aéroport international et leur engagement pour le classement de l’archipel au patrimoine mondial.

    Manuel Valls poursuivra sa tournée demain à Rangiroa, puis à Moorea et Rurutu. À Hiva Oa, il aura découvert bien plus qu’un paysage : une terre où la culture est une affaire d’honneur, et un levier d’émancipation politique.

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