Le dépotoir se trouve à une centaine de mètres seulement des premières habitations. Lorsqu’il brûle, la fumée se répand dans tout le quartier. Faena, un habitant raconte ce qu’il endure avec son épouse et leur petit garçon de 6 mois : « Aucun élu n’est venu me dire ‘est-ce que la fumée ne me gêne pas’. Il y a du plastique. La fumée arrive jusqu’à ma maison et quand il pleut, il entre dans mes citernes. Je vais remplir ailleurs mes bouteilles d’eau. »
Un terrain privé détourné de son usage initial
Le site, creusé à l’origine pour accueillir uniquement des déchets verts, reçoit désormais plastiques, électroménagers, métaux, cartons. Tout est régulièrement brûlé à ciel ouvert.
Selon une habitante, le terrain avait été mis à disposition de la commune pour un usage strictement limité : « Au départ, la commune représentée par un de ses tavana est partie voir une de mes tantes, qui n’habite pas sur l’atoll, mais qui est justement aussi propriétaire du terrain, pour lui demander si la commune avait le droit de déposer des déchets verts sur une partie du terrain, donc la partie qui est côté océan. Ma tante a donné son accord, elle a dit il n’y a pas de soucis, ce sont des déchets verts, allez-y. Elle ne s’attendait pas à ce que ce soit aussi catastrophique. »
Depuis, les habitants ont multiplié les signalements à la gendarmerie et à la DIREN, sans succès.
Une zone protégée menacée
Le dépotoir est situé en plein coeur d’une zone ZPR (Zone de pêche réglementée), pourtant classée et protégée. « C’est en plein dans la zone ZPR, une zone pourtant protégée. Avec les vents, les chiens, les déchets bien sûr qui finissent dans la mer. On est côté mer, c’est normal« , explique une riveraine.
Elle ajoute : « ce qui est quand même aberrant ici, c’est qu’il n’y a aucune clôture pour protéger justement le dépotoir. Il y a des enfants qui viennent jouer là, qui essayent de récupérer des petites babioles pour jouer avec… C’est complètement dégueulasse. Les enfants peuvent tomber malades à cause de ça. »
Le maire invoque un manque de moyens
Le Tavana de Manihi, John Drollet, reconnaît l’ampleur du problème. « Les déchets, c’est mon gros problème. C’est un dépotoir, c’est pour nous dépanner ça parce que s’il faut amener de l’autre côté qui se trouve très loin, ça nous ferait beaucoup de dépense. On brûle ce qu’on peut, on trie le reste, on compacte et on envoie à Papeete.«
La commune envisage de déplacer le site, mais les contraintes financières et logistiques restent lourdes. « La solution, ce serait de trouver du côté de Tera pae un coin où on pourrait enfouir. Mais c’est loin, ça coûterait cher, et on risquerait d’augmenter les tarifs des poubelles. C’est compliqué« , admet le maire.
En attendant une solution durable, le dépotoir reste actif à quelques dizaines de mètres des habitations. Les fumées continuent d’envahir les foyers et les habitants s’inquiètent pour leur santé et celle de leurs enfants. Une situation qui illustre les défis environnementaux des petits atolls, où la gestion des déchets reste un défi permanent.


                                    
