+125 % de SDF en Polynésie entre 2018 et 2023, le rapport alarmant de la CTC sur la pauvreté

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    C'est un rapport détaillé de 116 pages que la Chambre territoriale des comptes a dévoilé ce lundi. Un document réalisé sur proposition du président du Pays Moetai Brotherson et qui concerne la politique de lutte contre la pauvreté et l'exclusion en Polynésie.

    Pour ce rapport dont l’analyse porte sur les années de 2020 à 2023, les ministères, la CPS, les communes, des associations, le Fare Tama Hau ont été interrogés.

    Car la pauvreté n’est pas qu’une question de revenus comme le souligne l’institution. Entrent en compte la cherté de la vie, l’accès aux services de santé, à l’éducation, à l’emploi, au logement, la sécurité alimentaire, le handicap ou encore l’aspect social.

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    Concernant l’accès à l’emploi tout d’abord. La CTC souligne que la modernisation rapide de la Polynésie française a permis la création d’emplois, mais a été opérée « de manière inégalement répartie sur le territoire et dans la population ». Ainsi, l’accès à l’emploi est « notamment moins difficile dans la zone urbaine de Papeete que dans la zone rurale de Tahiti et dans les archipels ».

    La crise sanitaire de 2020 a par ailleurs laissé des traces. « En dépit d’une reprise de l’emploi salarié entre 2021 et 2023, les postes nouvellement créés ne relevaient pas nécessairement des mêmes secteurs d’activité que ceux affectés par les pertes d’emplois en 2020 », relève la CTC.

    Si l’accès à l’emploi n’est pas toujours évident, certains diplômes « protègent relativement de la privation d’emploi » relève l’institution. Les personnes diplômées de l’enseignement supérieur affichent un taux de chômage de 2.4% contre 8.1% pour les personnes sans diplôme.

    Cherté de la vie

    Avoir un travail c’est une chose. Il faut ensuite se nourrir. La cherté de la vie, c’est un sujet qui revient régulièrement dans le débat public, les produits alimentaires affichant des tarifs élevés. « Si certaines productions locales comme les produits de la mer couvrent les besoins, ce n’est pas le cas pour les autres produits alimentaires (riz, farine, sucre, etc.) ni pour les produits de consommation courante et d’équipement du foyer (…) 94% des produits de consommation disponibles en Polynésie française sont importés. Cette situation participe à la différence de prix entre un même produit acheté dans l’Hexagone et en Polynésie française », relève la Chambre.

    Certaines catégories de population sont plus exposées à la pauvreté : les familles monoparentales, les jeunes en parcours d’insertion, et les personnes âgées vivant seules.

    Le logement, c’est aussi une des dimensions de la pauvreté. Les dépenses pour se loger peuvent représenter « plus de la moitié des charges pour les ménages les plus précaires », note le rapport.

    + 125% de sans-abris entre 2028 et 2023

    Il faut se loger, et décemment. À ce propos, les données suivantes sont glaçantes : « Les caractéristiques d’un logement présentant une situation de pauvreté reposent notamment sur la présence d’un lieu d’aisance, l’alimentation en électricité, l’accès à l’eau courante, la présence d’une salle de bain, d’une cuisine et d’un lave-linge, est-il expliqué dans le document. Il ressort du recensement (de la population de 2022 réalisé en 2024, NDLR) que plus de 1000 ménages polynésiens cumulaient cinq manques ou plus »…

    Et puis il y a ceux qui n’ont pas du tout de logement. Le nombre de sans-abris a progressé de près de 125% entre 2018 et 2023 selon les données publiées par la direction des Solidarités, des familles et de l’égalité (DSFE). Ces personnes viennent d’horizons divers. Certains fuient des conflits familiaux, d’autres sortent de détention, d’autres encore sont des « travailleurs pauvres », des personnes effectuant plusieurs emplois, mais n’ayant pas assez de revenus pour se loger.

    La CTC note les « nombreuses actions engagées » par le Pays : aides sociales, soutien aux associations de proximité, lutte contre l’habitat insalubre, développement du logement social… Mais « en dépit de ces engagements, l’absence d’évaluation des actions empêche de mesurer leur efficacité et de les ajuster en conséquence », estime l’institution. « La lutte contre la pauvreté et l’exclusion mise en œuvre par la Polynésie française manque de coordination et de pilotage transversal ».

    Le schéma directeur de l’action sociale et médico sociale prévoit l’installation d’un observatoire destiné à centraliser les données afin de mieux suivre les parcours individuels. La CTC recommande la mise en place de ce dispositif dès 2026, appuyé par des enquêtes de terrain.

    La Chambre souligne aussi l’importance d’atteindre l’objectif de création de 800 logements sociaux neufs chaque année.

    En tout, 8 recommandations ont été formulées. Les dernières données, datant d’il y a 10 ans, montrent que plus d’un quart des individus vit sous le seuil de pauvreté monétaire.

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