Charpentes métalliques, béton, tôles, le coût des matériaux de construction s’est envolé depuis la pandémie de Covid.
Des niveaux inédits qui ont poussé l’Assemblée de Polynésie à créer une commission d’enquête sur l’inflation des prix. Ses membres : Thilda Garbutt-Harehoe, Béatrice et Tematai Le Gayic, et Tepuaraurii Teriitahi. Ces élus ont édité un rapport de 96 pages en fin d’année dernière.
– PUBLICITE –
Il en ressort que le prix du bâti, au fenua, a doublé en l’espace d’une décennie. Parmi les causes : l’explosion des prix des matériaux de construction. Plus 26 % entre 2020 et fin 2024
« L’augmentation des prix des matériaux de construction et des prix d’importation peuvent avoir d’énormes répercussions sur le marché de l’immobilier. Dans les auditions que nous avons eues, plusieurs professionnels du secteur ont souhaité que le Pays soit davantage dans l’accompagnement », déclarait à Tarahoi, Tematai Le Gayic.
Ces prix ont impacté l’ensemble du secteur du bâtiment. « Avant, un client nous demandait un devis et faisait la même chose chez nos confrères. Puis il prenait le devis dans sa globalité et il achetait chez celui chez qui c’était le moins cher. Aujourd’hui, ce n’est plus ça. On ne valide plus un devis complet. On valide ligne par ligne chez le moins cher des opérateurs », constate Jérôme Barraillé, directeur d’une société de vente de matériaux de construction.
Cette prudence se ressent jusqu’au bout de chaîne du BTP : la vente de biens immobiliers. « Aujourd’hui, on a la pression sur le foncier et sur les matériaux de construction », déplore Jacques Menahem, président de la fédération polynésienne des agents immobiliers.
« Les 2 cumulés dont que les ventes se font à un prix très important. Autrefois, beaucoup de gens pouvaient acheter, pour 30 millions de francs, on trouvait quelque chose, mais aujourd’hui, à ce prix, on trouve un studio », ajoute-t-il.

Parmi les préconisations de la Commission d’enquête, « économiser sur la taxation appliquée au fret », comme l’indiquait à l’Assemblée Tepuaraurii Teriitahi. « La problématique, ce sont les recettes du Pays », tempérait-elle.
« Fixer un maximum sur le prix CAF sur lequel on viendrait caper la fiscalité ? Pourquoi pas. Mais ce sont des longues discussions qu’il faut que j’aie avec mon ministre de l’Economie et des Finances. Sinon, c’est le Pays qui va absorber les évolutions de tarifs sur le transport », soulignait le président Moetai Brotherson.
« Je suis certain que sur le long terme, on aura plus de constructions, plus de travail, plus de gens qui pourront acheter », affirme Jacques Menahem, « il y a toute une économie qui se met en place et quand on l’étouffe avec pas mal d’impôts et autres choses, il y a moins d’investissements qui se font ».
Le dernier point de conjoncture de l’Institut de la Statistique de Polynésie, daté du mois de juillet, fait néanmoins état d’un fléchissement des prix des matériaux de construction. Parmi lesquels le bois.
« C’est essentiellement lié à l’arrêt du marché spéculatif aux États-Unis. On a aussi retrouvé des niveaux de parité monétaire qui sont à peu près en phase avec ce qu’ils étaient avant la Covid. Pour le bois, le référentiel prix a baissé de 15 à 20% », explique Jérôme Barraillé.
Le développement des filières de production locale fait aussi partie des pistes privilégiées par la commission d’enquête pour une meilleure maîtrise des coûts.
« On est propriétaire de 2 scieries aux Marquises et on a démontré qu’on avait un niveau de qualité et de fiabilité, et de performance du bois, qui était en phase avec la demande (…) À nous de trouver les réglages et les familles de produits sur lesquels on peut générer de la valeur ajoutée », souligne Jérôme Barraillé.
Un travail est en cours avec les professionnels du secteur et les organismes de certification pour créer un référentiel du bâtiment. Pourquoi pas, avec la Nouvelle-Calédonie, afin de l’adapter aux besoins et aux ressources des pays du Pacifique.